Viaduc de chemin de fer de Port-Launay, sur la ligne de train Brest Quimper

Pour le retour des voies ferrées d’intérêt local

Quel pourrait être le futur du rail en nord-Finistère ?

Dans l'objectif national de réduction de l'usage des énergies fossiles, les transports de biens et de personnes sont un levier majeur. Ils représentent en effet 32% des émissions territoriales bretonnes en 20181. Le système ferroviaire nous semble être un bon modèle d'avenir pour les déplacements en Bretagne et spécialement en nord-Finistère.

Bien sûr, des actions de sobriété sont souhaitables en premier lieu, pour limiter les besoins en déplacements. La revitalisation des centres-bourgs et centres-quartiers qui maximise l’accessibilité des services et commerces de proximités est clé.

Une carte du possible futur du rail en nord Finistère, une proposition de l'Atelier Tro-heol pour une mobilité durable dans le pays de Brest et de Morlaix Pass rail à 50€ par mois, ma gare à moins de 10 km, etc. Les avantages d'un réseau ferré d'intérêt local dense.

Le TER Quimper-Brest, par exemple, est pour le moment plus lent qu’en voiture/camion. Il pourrait desservir Le Faou, L’Hôpital-Camfrout, Daoulas, Loperhet et Plougastel et passer l’Élorn au niveau du pont Albert Louppe. Ce pont a d’ailleurs été prévu dès sa construction en 1922 pour accueillir une voie ferrée sur son tablier inférieur.

Une carte postale du Pont Albert Louppe entre Brest et Plougastel. Le tablier inférieur est réservé à une voie de chemin de fer qui n'a jamais été mise en service.

Prenons des déplacements pendulaires, entre la Communauté de Commune du Pays des Abers et Brest métropole par exemple : cela représente de l’ordre de 30 000 déplacements quotidiens, réalisés à 87% en voiture, le plus souvent seul(e)2. Cela représenterait 70 TER Breizhgo Z215003 pleins dans chaque sens, soit l’équivalent d’un départ toutes les 15 minutes en moyenne de 6h à minuit.

L’objectif n’est cependant pas de provoquer un effet rebond du trafic routier. L’effet rebond est le fait de ne pas obtenir les gains attendus alors qu’on a été efficaces pour économiser de l’énergie, du temps, de l’argent, etc. Dans notre cas, le développement d’un dense réseau de train doit s’accompagner de mesures favorisant la réduction de l’usage voiture-camion quand une alternative ferrée existe.

Ce report peut être réalisé sans creuser les inégalités par la mise en place d’un pass illimité de transports publics pour, par exemple, 50€ par mois, soit huit fois moins que ce que coûte une voiture à un foyer français4. Ce type d’abonnement sans engagement est en place en Allemagne depuis le 1er mai 20235, après une expérimentation à 9€ par mois en 2022 qui a fait exploser l’utilisation des transports en commun pour les usages quotidiens et de loisir.

Nous avons basé notre exercice de projection sur les lignes ayant existé par le passé, ayant été projetées ou sur les principaux axes de déplacement actuels. Le Réseau Breton a été, entre les années 1900-1930, un des plus importants réseaux ferroviaires secondaires de France.

Une carte du réseau tel qu'il était il y a 100 ans : une gare dans chaque bourg pour le transport de passagers et pour le fret.
Au plus fort du développement de ce réseau (dans les années 1920), tout point du territoire [français] se trouvait à moins de 30 km d’une gare (distance observée dans l’Aubrac) et, sur les trois quarts du pays, cet éloignement maximal tombe à 10 km !6

Ce sont ainsi plus de 750 km de voies ferrées qui étaient en exploitation à l’époque en Finistère, à comparer aux 240 km environ qui subsistent aujourd’hui.

D’un point de vue économique, on pourrait espérer que l’exploitation de ces lignes soit à l’équilibre, comme l’a été au début du XXè le réseau des Chemins de Fer Départementaux du Finistère7. La disparition de ces petites lignes n’est en effet pas due à leur insoutenabilité économique, mais à la concurrence de la route, plus rapide à l’époque.

Au-delà de tous les impacts positifs que nous avons pu citer jusqu’ici qui justifient un tel plan, nous souhaitions par cette publication surtout donner à voir un futur quand lequel on se projette, où on vivrait et travaillerait avec plaisir. C’est également pour montrer qu’un futur bas-carbone, sobre, efficace, résilient, local n’est pas une punition. La punition serait de notre point de vue de s’entêter dans le système voiture-camion et ses conséquences.

Et vous, comment voyez-vous les mobilités du futur en nord-Finistère ? Écrivez-nous pour nous raconter !

Prendre le meilleur d'hier et d'aujourd'hui pour plus de sobriété et d'efficacité énergétique. Face aux limites planétaires en Finistère, soyons ambitieux !

Sources :
[1] Évolution des émissions de gaz à effet de serre en Bretagne depuis 2010 - Observatoire de l’Environnement en Bretagne
[2] EMD du Pays de Brest, 2018
[3] Matériel roulant en Bretagne, Breizhgo
[4] L’utilisation d’une voiture coûte en moyenne 402 € par mois - Mobicoop
[5] Le Deutschland Ticket : tous les transports en commun allemands à volonté pour 49€ par mois - France Bleu Lorraine Nord, 2023
[6] « L’apogée des chemins de fer secondaires en France : essai d’interprétation cartographique » - Etienne AUPHAN, Revue d’histoire des chemins de fer
[7] Finistère en petits trains - Alain de Dieuleveult, p. 148, Éditions Cénomane / La Vie du Rail, 1998